À compter du 1er janvier 2025, les règles relatives à la responsabilité extracontractuelle changeront considérablement, ce qui aura d'importantes répercussions sur les auxiliaires tels que les prestataires de services, les actionnaires et les administrateurs. Alors qu'ils bénéficient encore d'une protection étendue contre les réclamations en matière de responsabilité, cette protection disparaîtra presque entièrement avec la nouvelle législation. Nos experts vous expliquent tout en détail.
Anno 2024 vs. de nieuwe regels vanaf 2025.
2024-2025 : ce qui change
Quelle est la situation actuellement ?
À l'heure actuelle, les auxiliaires jouissent d'une certaine immunité. Cette protection, souvent appelée « quasi-immunité de l'agent d'exécution », implique que dans la plupart des cas, ils ne peuvent pas être tenus responsables des dommages subis par un tiers. Autrement dit, s'ils commettent une erreur, le client final (nous entendons par là le client du donneur d'ordre) ne peut pas les tenir directement responsables. Seul le donneur d'ordre le peut.
La société B a conclu un contrat avec son client final A. Pour l'exécution effective de ce contrat, B fait appel à un collaborateur, à savoir C.
Dans la situation actuelle, si C commet une erreur, il bénéficie d'une protection étendue :
Une action contractuelle de A, le client final, à l'encontre de C, le collaborateur, est exclue en raison de l'absence de contrat entre A et C.
A ne peut pas non plus introduire d'action extracontractuelle à l'égard de C (en raison de la « quasi-immunité » mentionnée plus haut). Attention : il existe évidemment des exceptions à la règle, comme une infraction par exemple.
Seul B, le donneur d'ordre, peut (contractuellement) se tourner vers C. Lors de l'exercice d'un recours, il faut tenir compte des accords conclus entre eux. Pensez par exemple à des clauses d'exonération ou à la limitation de la responsabilité à une somme déterminée.
Une action extracontractuelle de B, le donneur d'ordre, à l'encontre de C, le collaborateur, n'est en principe pas possible en raison de « l'interdiction de concours » entre la responsabilité contractuelle et extracontractuelle.
Qu'est-ce qui change à partir de 2025 ?
Les nouvelles règles en matière de responsabilité suppriment la quasi-immunité. En effet, à compter du 1er janvier 2025, les auxiliaires ou « agents d'exécution » pourront bel et bien être tenus directement responsables par une partie lésée avec laquelle ils n'ont conclu aucun contrat. Autrement dit, un client final pourra désormais poursuivre non seulement son contractant direct (par exemple le donneur d'ordre), mais également l'agent d'exécution chargé du travail.
Pour reprendre l'exemple ci-dessus, nous constatons qu'en raison des nouvelles règles, A (le client final) pourra, en plus de son action (extra)contractuelle à l'encontre de B (le donneur d'ordre), également introduire une action extracontractuelle à l'égard de C (le collaborateur). Cela signifie que C courra désormais bien plus de risques d'être tenu responsable par des parties avec lesquelles il n'a conclu aucun contrat.
Ce changement s'appliquera également aux contrats conclus avant le 1er janvier 2025, mais uniquement pour les faits qui surviennent après cette date. Il n'y a donc pas de durcissement de la responsabilité pour les faits survenus avant l'entrée en vigueur des nouvelles règles. À partir de 2025, les auxiliaires ou « agents d'exécution » pourront cependant être tenus responsables en cas de fautes, même s'ils travaillent sous d'anciens contrats.
Voilà pourquoi il convient de prendre des mesures de manière proactive :
1) Modifiez vos contrats (de collaboration). Vous pourrez ainsi exclure la responsabilité extracontractuelle, intégrer une responsabilité maximale et prévoir des limitations et exclusions de responsabilité en cas de dommages.
2) Révisez vos conditions générales et veillez à ce qu'elles soient conformes à la nouvelle législation.
3) Vérifiez si votre assurance offre la bonne couverture et qui sont exactement les « assurés ».
4) Examinez les contrats conclus avec vos clients (finaux) pour limiter ou même exclure les actions extracontractuelles à l'encontre des collaborateurs (indépendants).
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Quelles sont au juste les conséquences des nouvelles règles en matière de responsabilité ?
1. Répercussions sur les prestataires de services
En tant que prestataire de services, votre responsabilité est généralement fixée contractuellement dans un contrat conclu avec votre donneur d'ordre. Il est souvent question d'une obligation de moyens, où vous vous engagez en tant que professionnel, sans qu'un résultat spécifique ne soit garanti. Il existe toutefois aussi ce qu'on appelle une obligation de résultat, où le fait de ne pas atteindre le résultat convenu suffit pour être tenu responsable.
Dans certains cas, un contrat de service peut contenir une clause qui engagera votre responsabilité pour tous les actes/toutes les négligences entraînant des dommages, sans aucune limitation. S'il n'y a aucune disposition dans votre contrat, un manquement à vos obligations (défaut d'exécution/faute) peut entraîner une responsabilité contractuelle sur la base du droit commun.
À compter du 1er janvier 2025, vous serez également concerné, en tant que prestataire de services, par la responsabilité extracontractuelle. Cela signifie qu'outre la responsabilité découlant des contrats, des tiers tels qu'un client final peuvent engager votre responsabilité, même s'il n'existe pas de relation contractuelle directe.
La nouvelle loi offre donc à la partie lésée le choix de réclamer des dommages à la partie contractante ou de tenir le collaborateur (indépendant) responsable de manière extracontractuelle.
Il va de soi que toute faute n'engage pas la responsabilité personnelle. Si la faute concerne uniquement un manquement contractuel, vous ne pouvez pas en être tenu personnellement responsable. Seules les fautes extracontractuelles, telles qu'un acte illicite ou une violation des normes de diligence, peuvent engager la responsabilité personnelle.
Si vous êtes malgré tout tenu personnellement responsable, vous pouvez vous défendre à l'aide de moyens de défense tant contractuels que légaux :
Limitations de responsabilité contractuelle : Si elles sont reprises dans le contrat conclu avec le donneur d'ordre, elles restent d'application et peuvent également être invoquées contre des tiers.
Protection légale : Les règles légales resteront également en vigueur après 2025. Ainsi, les collaborateurs conservent par exemple leur limitation de responsabilité en vertu de l'article 18 de la loi relative aux contrats de travail, les administrateurs peuvent invoquer les limites prévues par le Code des sociétés et des associations (CSA), et les (éventuelles) règles de prescription particulières demeurent applicables.
De plus, la nouvelle législation est à caractère supplétif. Autrement dit, dans la plupart des cas, vous pouvez convenir contractuellement d'exclure entièrement ou partiellement la responsabilité extracontractuelle. Ce n'est toutefois pas possible pour les fautes liées à la violation de l'intégrité physique ou psychique, aux dommages intentionnels ou aux erreurs pour lesquelles vous êtes légalement responsable.
2. Répercussions sur les administrateurs
En tant qu'administrateur d'une société, vous avez une responsabilité importante et pouvez être directement tenu responsable par des tiers ou la société elle-même dans plusieurs cas :
Faute de gestion : En tant qu'administrateur, vous êtes dans l'obligation d'exécuter vos tâches correctement. Si vous n'agissez pas comme un « administrateur normal et prudent », vous pouvez en être tenu responsable.
Violation du Code des sociétés et des associations (CSA) : Pensez ici au fait de ne pas déposer à temps les comptes annuels ou de ne pas convoquer l'assemblée générale. Une violation de la procédure de conflit d'intérêts peut également engager la responsabilité.
Acte illicite : Vous êtes responsable si vous commettez une faute qui entraîne des dommages, par exemple à cause d'une violation des normes de diligence générales ou à cause d'une infraction.
Faute grave manifeste : Si votre faute a contribué à la faillite de la société (par exemple à cause d'une fraude fiscale grave), vous pouvez en être tenu responsable.
Poursuite d'une activité déficitaire (« wrongful trading ») : En ne déclarant pas une faillite dans les délais (dans le mois suivant la cessation des paiements), vous pouvez être tenu responsable des dettes contractées par la suite.
Dettes fiscales et vis-à-vis de l'ONSS : Vous pouvez être tenu responsable des dettes fiscales de la société si elles résultent d'une mauvaise gestion de votre part. En ce qui concerne les dettes vis-à-vis de l'ONSS, la responsabilité est essentiellement engagée s'il y a eu plusieurs faillites antérieures.
Ces règles s'appliquent non seulement aux administrateurs formellement nommés, mais aussi aux administrateurs de fait, c'est-à-dire les personnes qui n'ont pas été officiellement nommées, mais qui dirigent la société dans les faits.
La loi accorde bien entendu également une certaine protection aux administrateurs en limitant la responsabilité. Cette limitation dépend de la taille de l'entreprise et est déterminée à l'aide du chiffre d'affaires moyen ainsi que du total du bilan des trois derniers exercices comptables :
Responsabilité limitée à
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Chiffre d'affaires hors TVA, sans dépasser
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Total du bilan moyen, inférieur à
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125 000,00 €
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350 000,00 €
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et
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175 000,00 €
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250 000,00 €
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700 000,00 €
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et
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350 000,00 €
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1 000 000,00 €
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9 000 000,00 €
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ou
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4 500 000,00 €
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3 000 000,00 €
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Entre 9 000 000,00 € et 50 000 000,00 €
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ou
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Entre 4 500 000,00 € et 43 000 000,00 €
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12 000 000,00 €
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50 000 000,00 €
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ou
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43 000 000,00 €
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Les limitations légales s'appliquent...
· Tant à l'égard de la société que des tiers
· Pour chaque fait distinct ou l'ensemble des faits
· Indépendamment du nombre de demandeurs ou de réclamations
· Tant pour la responsabilité contractuelle qu'extracontractuelle
· Pour tous les administrateurs conjointement
Attention : Bien que la responsabilité soit limitée, elle reste solidaire, ce qui veut dire que chaque administrateur individuel est en principe responsable du montant total.
Il existe évidemment un certain nombre d'exceptions où les limitations légales ne s'appliquent pas, à savoir :
· en cas de fautes légères répétées
· en cas de fautes graves
· en cas de dol ou de fautes intentionnelles
· en cas de fraude fiscale grave
· en cas de responsabilité spécifique pour les dettes fiscales et vis-à-vis de l'ONSS
Tenez en outre compte du fait que le CSA ne permet pas qu'une société limite la responsabilité de son administrateur. Cela signifie que la société ne peut pas préalablement libérer son administrateur de sa responsabilité envers la société elle-même (« exonération ») et ne peut pas non plus garantir sa responsabilité envers des tiers (« garantie »). En outre, une limitation dépassant le « plafond » fixé par la loi n'est pas autorisée non plus.
Bon à savoir : Cette règle n'exclut pas qu'une société puisse, dans son contrat avec une autre partie, exclure la responsabilité extracontractuelle de l'administrateur et/ou que la société mère ou l'actionnaire puisse garantir le(s) administrateur(s).
Une bonne manière de se protéger en tant qu'administrateur est de souscrire une assurance responsabilité des administrateurs, également appelée police D&O. Cette assurance offre une couverture contre les conséquences financières des fautes dans les limites légales. Attention toutefois ! Vous exercez votre mandat d'administration via une société (de management) ? Dans ce cas, en tant que représentant permanent, vous êtes tout de même personnellement responsable, et ce, de la même manière que votre société de gestion.
1. Qu'en est-il des actionnaires ?
Pour terminer, votre degré de responsabilité en tant qu'actionnaire dépend du type de société :
SNC ou SComm : En tant qu'associé dans une société en nom collectif (SNC) ou une société en commandite (SComm), vous engagez votre responsabilité de manière illimitée. Autrement dit, vous êtes, avec vos partenaires, responsable solidairement des obligations de la société.
SRL, SA ou SC : En tant qu'actionnaire d'une société à responsabilité limitée (SRL), d'une société anonyme (SA) ou d'une société coopérative (SC), vous n'êtes pas personnellement responsable des dettes de la société, ce qui signifie que les créanciers de la société ne peuvent pas revendiquer votre patrimoine privé, par exemple en cas de faillite.
1) Imaginez que deux personnes, A et B, fondent ensemble une SRL avec un capital de départ de 5 000,00 €. A apporte 3 000,00 € en totalité (somme entièrement libérée), tandis que B apporte 2 000,00 €, mais n'en libère que 25 %. Le risque de A est limité à 3 000,00 €, tandis que B risque de perdre son apport déjà libéré, à savoir 500,00 €, et de devoir libérer le solde de son apport (soit 1 500,00 €).
2) A fonde une SRL avec un capital initial de 5 000,00 €, puis vend 100 % des actions pour la somme de 10 000,00 € à B. Le risque de B s'élève ici à 10 000,00 €, à savoir le montant total qu'il a déboursé pour acquérir les actions.
Le risque encouru ne s'élève donc qu'à hauteur du montant que vous avez apporté lors de la création de la société ou du prix que vous avez payé pour les actions. Vos actions n'ont pas été entièrement libérées lors de la création de la société ? Vous pouvez dans ce cas encore être tenu responsable du montant restant que vous auriez dû apporter ou que vous aviez promis d'apporter.
Attention ! Vous vous êtes porté caution personnelle ? Vous êtes alors personnellement responsable des dettes spécifiques de la société. Il s'agit d'une exception importante à la protection dont vous bénéficiez normalement en tant qu'actionnaire d'une SRL, d'une SA ou d'une SC.
Voici les différentes situations dans lesquelles, en tant qu'actionnaire, votre responsabilité personnelle peut tout de même être engagée :
Responsabilité des fondateurs : Les fondateurs d'une SRL peuvent être tenus personnellement et solidairement responsables des dettes de la société si le capital de départ était manifestement insuffisant pour les activités prévues. Cela vaut si la société fait faillite dans les trois ans suivant sa création. À noter : ce n'est le cas qu'après décision judiciaire, dans laquelle le juge prend en considération le plan financier et les circonstances.
Bon à savoir : Lors de la création d'une SRL, vous pouvez choisir d'agir en tant que souscripteur pour des actions (jusqu'à un maximum de 2/3 des actions) plutôt qu'en tant que fondateur de manière à réduire le risque lié à la responsabilité des fondateurs.
Débit d'un compte courant : Si, en tant qu'actionnaire, vous avez une dette envers la société au moment d'une faillite (par exemple via un compte courant), le curateur peut vous en tenir responsable.
Responsabilité pour les cotisations sociales : La société est responsable du paiement des cotisations sociales pour ses administrateurs et actionnaires actifs. Inversement, les administrateurs et les actionnaires peuvent être responsables du paiement des cotisations annuelles à charge de la société.